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 Retour d'exil (pv Thaïs de Langres)

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Louis d'Enghien
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MessageSujet: Retour d'exil (pv Thaïs de Langres)   Retour d'exil (pv Thaïs de Langres) EmptyJeu 10 Mar - 7:40

C’était une glaciale soirée de décembre. A minuit passée, la nuit avait étendu son ombre sur Paris endormie. La capitale de France, première ville d’Europe, était endormie, et seuls des chats errants ou une poignée de passants arpentaient encore les rues de la ville. Seule exception, un fiacre noir se confondant avec la nuit, tiré par quatre chevaux, traversait la ville d’un pas rapide, mais suffisamment mesuré pour éviter d’attirer l’attention à une heure si tardive.

Depuis la fenêtre gauche de la calèche, Louis Antoine d’Enghien contemplait pensivement les rues recouvertes de neiges qui défilaient sous ses yeux. Dans le quartier qu’ils traversaient des réverbères n’avaient pas encore été installés, mais c’était une nuit de pleine lune, la seule du mois, et on pouvait y voire presque comme en plein jour. Le duc d’Enghien approchait au terme du voyage qu’il avait entreprit deux semaines plus tôt : bientôt il serait à la cathédrale Notre-Dame, où il devrait retrouver ce mystérieux contact dont il ignorait tout. Qui donc pouvait-il être ? Comment être sur que la police de l’Usurpateur ne lui tendrait pas un piège.

A ces questions sans réponses s’ajoutait une mélancolie qui pesait lourdement sur le cœur du jeune duc depuis son départ d’Ettenheim. Il avait été contraint d’y abandonner Charlotte de Rohan-Rochefort, son unique amour, sans une explication, sans un mot d’adieu. Maintenant le remord ne le quittait pas, en même temps que ce sentiment de vide, d’absence. Il se sentait seul, infiniment seul. Alors qu’il ne devrait se consacrer qu’à sa mission, sans cesse le visage de Charlotte revenait à son esprit.

-Vous me paraissez ailleurs, mon cousin. A quoi pensez-vous ?

Louis Antoine tourna son regard vers celui qui était assis en face de lui, un vieillard de plus de soixante-dix ans enserré dans un costume chamarré d’Ancien Régime, avec perruque poudrée et parements dorés. Le Prince de Conti. Pendant les quelques jours qu’il avait passé chez son hote, Louis ne s’était guère lié avec lui. Le prince de Conti était un homme intelligent et raffiné, mais son cynisme, sa façon d’aborder brusquement les thèmes les plus sensibles, et plus généralement son absence de sentiments envers autrui en faisait quelqu'un d’antipathique. Qui plus est, son passé était encore trouble. Revenu d’émigration après la Fête de la Fédération, ce riche prince du sang avait prêté allégeance à l’Assemblée Législative puis à la Convention. Ce qui ne l’avait pas empêché d’être arrêté sous la Terreur, puis exilé à Barcelone par le Directoire. Revenu en France après Brumaire, il s’était rallié au régime de Bonaparte, et restait en vue dans les cercle de la famille impériale. Pourtant, voilà que depuis quelques mois le prince reprenait contact avec la cour exilée, et jouait un double jeu : tout en se faisant passer pour un fidèle du nouveau régime, il avait déjà rendu des services appréciables pour la cause de la monarchie. En résumé, un personnage ambigu et retors, qui changeait de camps avec une très grande aisance.

-A l’avenir, à la fragilité de nos destins… Nous vivons une époque bien troublée, pensez-vous que nous puissions renverser rapidement l’Usurpateur ? Que tout pourra redevenir comme avant cette horrible année 1789 ?

-Je ne sais, et je ne m’en préoccupe guère outre mesure. Voyez-vous, lorsque le tyran actuel tombera du haut de son piédestal, un suivant prendra sa place, puis un autre encore. Il en est ainsi depuis la nuit des temp. A chaque fois on promet aux hommes de grands changements, des jours meilleurs, plus de justice et de paix… Mais ce n’est qu’illusion. L’homme est un loup pour l’homme, disait Horace ; ceux qui prétendent nous guider et faire notre bien ne sont que des charlatans, ils ne cessent jamais qu’à s’enivrer de ce vin empoisonné qu’est le pouvoir.

-Mais... Comment vous, un prince du sang, placé dans l’ordre de succession au trône juste après moi-même, pouvez-vous parler ainsi ? Ne croyez-vous donc en rien ? Ne pensez-vous pas qu’à travers le Roi c’est Dieu qui veille sur nos personnes ?

Un sourire cynique anima le visage du prince.

-Vous êtes encore jeune, mon cousin, et bien naïf. Je reconnais bien là l’espoir aveugle qui sied à votre age. Celui que vous appelez le Roi ne fera pas plus le bonheur de la France que ceux qui l’ont précédé. Croyez-en mon expérience, le pouvoir est maudit. Cessez donc de poursuivre ces chimères, et profitez de l’instant présent. Prenez femme et fondez une famille, retirez-vous sur vos terres, faites fructifier vos affaires, occupez vous uniquement de vous même et de votre famille et gardez l’oreille sourde aux monts et merveilles que vous promettent les imposteurs. Faites ce que je n’ai jamais eut le courage de faire moi-même.

Les paroles abruptes du prince blessèrent Louis Antoine comme un pic de glace qu’on lui aurait enfoncé dans le cœur, lui qui venait justement de sacrifier son amour et sa vie de dandy sur l’autel de l’Histoire. Il se rendit compte du fossé insondable qui les séparait : lui jeune homme passionné qui ne vivait que pour ses principes, lui vieillard désabusé qui ne servait jamais que lui-même. Ce devait être uniquement pour rester en vue auprès de la Cour en Exil qu’il leur avait proposé ses services.

La calèche s’arrêta alors, le duc d’Enghien tourna la tête vers la fenêtre et devina l’imposante silhouette de la cathédrale Notre-Dame. Le Prince de Conti se leva péniblement et ouvra la petite portière.

-Nous y sommes mon cousin. Il nous faut nous séparer, maintenant. Bon courage et… bonne chance.

Encore marqué par leur conversation, Louis Antoine salua son hote de la tête, se saisit de la petite malle contenant ses affaires et descendit prestement de la voiture. Il faillit glisser au passage sur des blocs de glace fraîche. La portière claqua derrière, et le fiacre s’ébranla, avant de disparaître dans la nuit.

Pendant quelques instants, Louis Antoine resta sur place, fasciné par la titanesque silhouette de Notre-Dame. Avec cette pleine lune, la cathédrale était entourée d’une lumière spectrale, irréelle, qui la faisait paraître tel un géant endormi, prêt à se réveiller à la Fin des Temps. Il n’y avait personne autour de lui, mais il craignait qu’un inspecteur de l’Usurpateur ne passe par là et ne se pose quelques questions sur ce voyageur seul et bien habillé. Il portait certes sur lui un pistolet chargé, mais cela ne suffirait pas quand accourraient un peloton entier de soldat. Ayant rabaissé son haut-de-forme pour cacher son visage, il gravit une à une les marches de l’édifice. Parvenu sur le pas du portique, il écarta légèrement la porte ouverte et entra dans la cathédrale.

L’intérieur était éclairé par quelques chandelles allumées pour la nuit, pour éclairer d’éventuels fidèles venant se recueillir. Religieusement, Louis Antoine s’approcha de l’abside contenant l’eau bénite, déganta sa main droite et se signa. Puis il promena son regard sur l’église. Il était seul, absolument seul : rares devaient être les croyants qui chercheraient à venir prier à une heure si tardive. Tant mieux, personne ne pourrait déranger son entretien avec la Mystérieuse Inconnue.

Levant la tête il contempla le toit de la cathédrale. Il admira les piliers, les nervures finement ciselées qui semblaient s’élever vers le ciel, les vitraux retraçant les scènes bibliques. Tout y était harmonie et grandeur, les artistes y célébraient la gloire de Dieu comme nulle part ailleurs. Son esprit le ramena à cette si difficile conversation qu’il venait d’avoir avec Conti. Sa lutte était-elle vraiment absurde, comme ce dernier le prétendait ? Seul dans la splendide cathédrale, imprégné de l’atmosphère du lieu, Louis Antoine sentit ses doutes se fissurer. Il se prit à penser que le Royaume de France était semblable à cet ouvrage : tout y était parfaitement ordonné pour que l’harmonie puisse régner entre chacun, et le Roi, représentant la volonté de Dieu et faisant régner le justice, était telle la plus haut sommet de la cathédrale. Non il ne se battait pas pour rien. Certes, il avait sacrifié toute une partie de sa jeunesse, et plus encore, à ses idéaux, mais cela n’avait pas aucun sens.

De nouveau sûr de lui, Louis d’Enghien chercha du regard la chapelle où il devait retrouver son mystérieux contact. Il finit par la repérer, à la droite de l’autel, et s’y dirigea à pas mesurés, ses bottes en cuir martelant le carrelage et faisant résonner le son dans tout l’édifice. Il y parvint bientôt, et constata que cette personne n’était pas encore arrivée. Il lui faudra donc attendre. Otant son couvre-chef, Louis Antoine s’assit sur une chaise face à l’autel. Les mains jointes, il ferma les yeux et se consacra à la prière. Il avait toujours été profondément croyant, comme son grand-père le lui avait enseigné, et il trouvait un vrai réconfort à se tourner vers Dieu dans les moments difficiles…
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Thaïs de Langres
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MessageSujet: Re: Retour d'exil (pv Thaïs de Langres)   Retour d'exil (pv Thaïs de Langres) EmptyJeu 10 Mar - 10:52

Le cœur battant, Thaïs relisait les quelques mots concis de la missive que Gaspard lui avait remise dans l’après-midi.

Annoncez notre attente respectueuse, reste admiratif immobile.

Ces quelques mots pouvaient sembler bien incompréhensibles pour le commun des parisiens, mais depuis longtemps Thaïs avait su ne lire que la seconde lettre de chacune de ces lettres mystérieuses, afin d’y déceler le mot qui s’y cachait.

«Notre Dame ». Elle n’avait accepté ce lieu que pour son roi, mais jamais elle ne pouvait admettre comploter dans un tel lieu sacré, quelle que fut son histoire et son état de délabrement actuel. Elle était bien trop pieuse, bien trop ancrée dans ses croyances provinciales de campagne pour ne pas songer à quelques malédictions qui la frapperaient si elle venait à blasphémer dans un tel lieu. Mais le roi était le roi ; de ce fait, elle serait certainement pardonnée pour ce manquement aux principes.

Sa longue cape sombre rejetée sur ses épaules frêles, Thaïs quitta le halo du lampadaire qui éclairait sa lecture et tournant furtivement la tête, s’assura que nulle âme ne la surprendrait. Marcher dans les rues la nuit tombée pouvait paraître suspect aux yeux de la milice qui patrouillait, mais entrer dans Notre-Dame à la nuit tombée était comme clamer sa culpabilité ! Elle trottina donc vers la bâtisse et se faufila prestement par l’une des portes dans l’immense cathédrale.

Une odeur de moisi la pris au nez si bien qu’elle plaqua sa main sur ses narines pour respirer convenablement. Le halo faible de la nuit passait au travers des vitraux brisés par le temps et illuminait d’un teint bleuâtre l’allée poussiéreuse. L’autel semblait attendre un prêtre invisible et pendant quelques secondes, Thaïs revit cette scène qu’elle avait vécu de nombreuses fois.
A l’ombre des arbres, éclairé par la lune, un prêtre célébrait une messe pour les fidèles qui avaient promis à Dieu de protéger ce réfractaire. Tant de messes fantômes dans ces petits villages !

Par instinct, elle fit une courte génuflexion et se signa lentement avant de rejoindre les bas côtés pour se rendre au fond de la cathédrale. Elle marchait lentement, sur la pointe des pieds, afin de ne pas éveiller l’éventuel vagabond qui pouvait chercher auprès de Dieu le réconfort. Le silence devenait presque étouffant malgré le vent qui passait au travers des vitraux. Le jour où Napoléon avait franchi ces portes était bien loin à présent. Les tentures avaient disparu pour montrer la réalité du délabrement de la cathédrale et le froid régnait à présent en maître.

La mission de Thaïs lui revint rapidement en tête dès qu’elle eu passé l’autel. L’homme qu’elle devait retrouver était-il déjà arrivé ? Etait-il seulement arrivé ici sans encombre ? Elle songea à nouveau aux directives de son oncle et elle senti ce petit picotement de fierté lui chatouiller l’estomac. Elle avait été choisie, elle, pour être le guide d’un royal cousin. Elle, Thaïs de Langres ! Elle sentit à nouveau son cœur battre lorsque apparurent les visages de sa famille ; elle savait qu’en agissant pour le roi, elle agissait également pour ses parents, pour son frère et pour ceux que la Révolution avait emporté avec elle.
Elle savait qu’elle serait à la hauteur de la mission confiée et la seule idée que celle-ci lui fut donnée par le prince de Condé la poussait au zèle. Elle en ferait plus, quoi qu’il lui demande !

Resserrant autour de ses épaules sa cape, Thaïs arriva bientôt dans les petites chapelles plus isolées de la cathédrale et bientôt, elle aperçu une silhouette agenouillée, les mains jointes, perdue dans une silencieuse prière. C’était donc là le cousin de la famille royale ; le descendant de ce prince qu’elle admirait tant et qu’elle avait voulu suivre à Quiberon si elle avait été un homme. C’était donc là le jeune homme pour qui elle devait être les yeux et les oreilles et qu’elle devait guider dans ce Paris comploteur. C’était là le représentant d’une famille qu’elle admirait bien trop !

Elle s’était arrêtée, observant silencieusement la silhouette agenouillée. Elle n’avait pas cherché à contacter ceux qui œuvraient pour le duc d’Artois ; son attitude en Angleterre avait enfoncé un poignard dans son cœur de poitevine et elle n’était parvenue à pardonner au duc son refus d’aider les derniers généraux vendéens. C’était Condé qui était à Quiberon, c’était son armée qui avait été massacrée par Hoche. C’était encore lui dont le petit-fils était agenouillé là, comme s’il attendait sur sa nuque l’épée du bourreau impérial.

Thaïs fit enfin un geste et sans oser rompre le pieux instant, fit quelques pas vers l’autel, faisant légèrement résonner ces chaussures pour éveiller l’attention. Elle se trouvait soudainement bien idiote, elle qui était d’ordinaire si déterminée ! Elle savait qu’une fois les premières paroles échangées, elle redeviendrait cette petite espionne à l’âme farouche et à l’esprit guerrier. La guerre l’avait façonné, non pas les salons !

Elle tira de sa poche un petit mouchoir blanc et murmura d’une voix hésitante, bientôt effrayée par la résonnance du lieu.

-Monseigneur ? N’avez-vous pas laissé tomber ceci ?

Elle afficha un sourire respectueux et abaissa enfin son capuchon pour découvrir son visage.

-J’ai reçu un billet de celui que je nomme le Grand Coëre dans notre petite cour du grand Miracle. Peut-être monsieur le prince vous a-t-il entretenu à son sujet sous le nom de Louis de Kervoix, monseigneur.

Elle s’approcha enfin, tendant de sa main gantée le petit mouchoir blanc.

-Il ne provient pas de Cholet, mais il en porte le symbole. Je suis Thaïs de Langres, monseigneur, la nièce de monsieur de Kervoix. Mon oncle m’a soufflé que vous pouviez avoir besoin de mon aide, aussi me voici.

Les joues certainement rosies, elle s’inclina respectueusement, peut-être trop, mais elle craignait que les battements de son cœur ne s’entendent dans toute la cathédrale. Jamais elle n’avait approché un membre de la famille royale d’aussi près ; jamais même elle n’avait espéré un jour en avoir l’occasion et jamais n’avait-elle un jour songé à ce qu’elle puisse être pour l’un d’eux un guide.
Ses cousins étaient destinés au trône de France avant lui, mais Thaïs, écœurée par les revirements des Bourbon, avait depuis longtemps placée sa confiance dans leurs cousins Condé ; le prince et son petit-fils étaient à ses yeux bien plus digne du trône français.

Elle releva la tête, le visage franc et le regard brillant.

-Commandez-moi, monseigneur, je suis, à défaut de votre homme, votre servante la plus zélée. Dites-moi ce que je puis faire pour votre service.
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Louis d'Enghien
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MessageSujet: Re: Retour d'exil (pv Thaïs de Langres)   Retour d'exil (pv Thaïs de Langres) EmptyMer 16 Mar - 8:50

Louis Antoine devait etre plongé dans ses méditations religieuses depuis une dizaine de minutes lorsqu'il sentit instinctivement la présence de quelqun à coté de lui. Il n'en douta pas un seul instand, seul son fameux contact devait se rendre à la cathédrale par une heure aussi tardive. Malgré tout, il ne se départit pas d'une certaine méfiance, indispensable lorsqu'on se retrouvait seul en territoire ennemi: il se tenait pret à dégainer son pistolet chargé si jamais le nouveau venu s'averrait etre un policier de l'Usurpateur. Il cessa de prier, ouvrit les yeux et se leva, faisant face à l'inconnu. Il était au comble de l'impatience, cela faisait tellement longtemps qu'il se demandait à qui il aurait affaire.

-Monseigneur ? N’avez-vous pas laissé tomber ceci ?

Le fameux mouchoir blanc dont parlait le prince de Condé ! Le doute n'était plus permis: c'était bien son contact royaliste qui se tenait devant lui. Ce dernier rabattit son capuchon, révélant le visage d'une très belle jeune femme aux cheveux sombres et bouclés. Louis lut tout de suite la fierté et la détermination dans son regard. Sous l'Ancien Régime, il lui aurait parut très étrange qu'une femme se mele de complot et de luttes de pouvoir, car celles qu'il rencontrait à la cour ne s'intéressaient qu'à leurs parures et à leurs amants. De plus, son éducation rigoriste lui avait appris le role de la femme, qui était de rester au foyer et de prendre soin des enfants. Mais qu'on le veuille ou non, certaines choses avaient changé. Dans les Guerres de Vendée, le duc d'Enghien avait vu des mères de familles courageuses se saisirent d'un fusil pour combattre les pilleurs républicains et soigner les blessés avec dévouement. Son opinion avait changé, et il avait comprit que la femme valait autant que l'homme pour ce qui est de la lutte contre le Chaos. Cette demoiselle semblait appartenir à cette catégorie d'amazones qui était bien plus fidèle à la Monarchie que certains hommes royaliste, tels le prince de Conti, qui changeaient de camps avec une grande aisance au gré du vent.

-Oui il me semble bien avoir entendu parler de votre oncle en termes fort élogieux. Mon grand-père l'avait rencontré alors que tous deux prenaient part au Débarquement de Quiberon. Je dois donc vous présenter mes hommages, mademoiselle de Langres.

Louis Antoine retira son haut de forme et l'inclina fort galamment en signe de révérence. Son éducation lui avait appris à se montrer courtois en toutes circonstances, plus encore lorsqu'on se trouvait en présence d'une personne aussi honorable que la nièce de Louis de Kervoix.

Maintenant, Louis Antoine s'appretait à demander à son interlocutrice de le conduire directement chez ses cousins d'Artois, tel que c'était prévu. mais avant qu'il ne prenne la parole, le doute le saisit. Quelle impression allait-il donner ? Celle d'un aristocrate sans expérience, incapable de se débrouiller seul, qui cherche absolument à se cacher derrière ses cousins ? Le duc d'Enghien avait aussi lu beaucoup d'admiration dans le regard de Thais; n'allait-il pas la décevoir en agissant ainsi ? Il le comprenait à présent: si il voulait jouer un vrai role dans les évènements à venir, il lui faudrait compter également sur lui-meme. Savoir agir en autonomie ne pouvait lui apporter que plus de crédibilité. Il est vrai que les Condé restait la seule branche de la famille royale encore irréprochable à peu de choses près: les Artois passaient pour couards depuis le débarquement de Quiberon, les Orléans étaient à jamais déshonorés par leur participation à la Révolution et les Bourbons d'Espagne se ridiculisaient avec leurs interminables querelles de famille.

-Merci, votre aide ne peut m'etre que très précieuse. Pour l'heure pourriez-vous m'accorder l'hospitalité pour au moins cette nuit ? J'espère ne pas vous déranger, mais je crois qu'il pourrait etre dangereux de poursuivre cette conversation à l'extérieur. Je suis en tout cas fort curieux de connaitre les nouvelles de Paris.

Le duc d'Enghien était maintenant déterminé à agir un peu de lui-meme, à tater le poul de la population et de s'informer avant d'agir. Il trouverait tout le temps de rejoindre ses cousins.
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Thaïs de Langres
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MessageSujet: Re: Retour d'exil (pv Thaïs de Langres)   Retour d'exil (pv Thaïs de Langres) EmptyMer 6 Avr - 8:37

Thaïs ne retint pas un nouveau rougissement lorsque le prince s’inclina devant elle. Elle ? Pauvre noble provinciale, être ainsi traitée par un prince de sang ? Elle inspira une bouffée d’air pour reprendre contenance : elle était dans ce lieu sacré au nom du complot, sa tête et son esprit devaient rester aussi froid que d’ordinaires.
Ce qui importait ce soir était non seulement de connaître les désirs du jeune homme quant à son implication à venir, mais également la raison qui le poussait à avoir confiance en elle. Il avait su placer ce nom de Kervoix au bon moment et les éloges lancés sur le compte de son oncle semblaient bien trop sincères pour être forcés. Ainsi, ce prince était-il comme tous ces hommes qui revenaient d’exil ; il était aujourd’hui l’égal de tous ces royalistes qui revenaient d’Allemagne ou d’Angleterre, de Belgique ou d’Espagne, ne sachant où trouver le soutien qui leur était salutaire.

La voix du jeune assurait Thaïs dans sa rapide conclusion. Ce prince, ce descendant d’une famille dont le passé était souvent auréolé de gloire, était devant elle comme son égal, à demander l’appui de la jeune fille qu’elle était. Imperceptiblement, elle senti, mêlée à une pointe de fierté, une crainte de ne pas être à la hauteur des attentes du duc.


-Merci, votre aide ne peut m'être que très précieuse. Pour l'heure pourriez-vous m'accorder l'hospitalité pour au moins cette nuit ? J'espère ne pas vous déranger, mais je crois qu'il pourrait être dangereux de poursuivre cette conversation à l'extérieur. Je suis en tout cas fort curieux de connaitre les nouvelles de Paris.

Thaïs, qui s’était reculée de quelques pas après avoir remis le message au jeune homme, s’arrêta dans son mouvement et le capuchon retomba mollement sur ses épaules.

-Oh, répondit-elle en laissant son exclamation en suspens. Il s’inquiétait de la déranger ?! Lui ? Un prince de sang ! Thaïs ne su comment réagir à cette marque de politesse sincère. Elle toussota légèrement pour reprendre contenance et lui répondit dans un sourire.

-Je peux conduire votre altesse où elle le souhaite, lui faire donner le meilleur des soupers et le plus confortable des lits dans la plus chaude maison royaliste de Paris , mais ça serait la livrer telle un gibier aux plus fins limiers de la capitale. Croyez-moi, monseigneur, mieux vaut vivre caché pour vivre en paix !

Elle réfléchit rapidement à quel chemin prendre pour lui conter la vie parisienne d’aujourd’hui. Il semblait être tels ces oisillons qui prenaient tout juste leur envol, ne se doutant peut-être pas de ce que le monde leur réserverait. Ou peut-être cachait-il derrière cette question une vision bien plus pointue de la situation qu’il ne laissait le montrer à Thaïs.
Elle ne voulu perdre aucune précieuses minutes à le lui demander et opta pour la première hypothèse.

Elle fit quelques pas vers la nef et s’assis doucement sur la première de trois petites marches de marbres, repoussant quelques feuilles mortes qui avaient volé par un vitrail brisé.

-Paris, monseigneur, est aujourd’hui une table de jeu, où le gain est votre propre vie. Il ne s’agit pas que d’abattre les meilleures cartes, mais laisser croire qu’on les as en main et bluffer afin d’arriver à ses fins.
Vous êtes prince de sang, mais il faut oublier l’éducation certainement rigoureuse que vous avez reçu. Si vous souhaitez vivre à Paris et aider à guérir la France de cette gangrène, il vous faut laisser vos scrupules en exil et oublier l’honneur, la franchise et l’honnêteté de votre sang.


Elle s’arrêta un instant et sourit, atténuant le ton sombre de ses paroles.

-Enfin…cela est à faire auprès de vos ennemis ! Ne craignez pas les gardes républicains, mais leurs épées qui sont tenues par les gradés. Ne vous faites pas de tout républicain un ennemi, car les langues se délient au plus offrant et ces langues-là ne sont pas les plus lourdes ! Laissez croire aux gens que vous êtes un autre, si vous souhaitez apparaître en public et guérir la France en conservant votre tête.
L’autre choix qui s’offre à vous est de rester auprès de vos cousins Bourbon, qui font agir et ne sortent pas, de peur que leurs têtes prennent la poudre d’escampette.


Elle eu un ton légèrement railleur, tant sa diatribe lui avait fait oublier la nature de son interlocuteur. Artois…Berry…Provence ; elle avait préféré les jeter tous dans le même sac afin de ne pas regretter ses paroles. La couardise de l’un valait pour les autres.
Elle s’arrêta à nouveau et termina sa contemplation du sol poussiéreux, relevant le regard vers le duc avant de s’incliner, les joues rosies.

-Pardonnez mes mots impertinents, monseigneur. Je n’ai pas à juger ainsi les frères de mon défunt roi et vos cousins.
Toutefois,
reprit-elle en relevant la tête, je ne puis vous conduire à eux, si je ne suis point de leurs servantes, je puis vous conduire à eux si tel est votre désir.

Et je puis vous donner un toit et un couvert, dit-elle dans un sourire intimidé.


Elle se leva, époussetant sa robe.

-Vous doutez-vous, monseigneur, de la complexité de la partie dans laquelle vous vous lancez ce soir ?
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MessageSujet: Re: Retour d'exil (pv Thaïs de Langres)   Retour d'exil (pv Thaïs de Langres) Empty

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